no 10/ Répertoire du financement pour étudiant.e.s africain.e.s (évolutif )

financement

Le 21 avril dernier, le Ministère de l’Enseignement Supérieur de la France émettait un communiqué officialisant une explosion des frais de scolarité pour les futurs étudiants étrangers qui s’inscriront à partir de cette date dans un programme d’études d’une institution de l’Hexagone. Autrement dit, ils devront désormais payer pas moins de 2 770 euros en licence et 3 770 euros en master, soit plus de dix fois le montant exigés de leurs compagnons de classe européens !

Sur le continent africain, il existe des situations où un manque de confiance systémique en ses propres ressources déclasse symboliquement les diplômés locaux, même si leur formation est tout à fait comparable, voire parfois plus rigoureuse ou mieux adaptée que leur équivalent obtenu dans une université du Nord. Je le dis d’emblée : dans un monde réellement décolonisé, les étudiants africains ne devraient pas avoir à payer le prix de l’exil (ou devraient, plus exactement, pouvoir en décider) afin de se prémunir d’un diplôme qui en vaille le nom, ou qui soit reconnu comme tel.

Comme toujours, l’argent est le nerf de la guerre et il faut parfois regarder au loin pour trouver les moyens de soutenir à moyen terme une formation de quelques années. En attendant d’explorer les avenues existant dans les quelques universités du continent qui encouragent la mobilité et l’accueil d’étudiants étrangers par des mesures attractives, j’ai sondé mon entourage afin de pouvoir répondre rapidement à la question, qui m’a été posée souvent, des avenues de financement pour les étudiant.e.s de philosophie et sociologie de cycles supérieurs. Que cela soit dit également, les concours de financement pour étudiants internationaux sont extrêmement compétitifs : il ne faut donc pas s’enthousiasmer trop rapidement, et s’armer de foi et de patience.

Pour les francophones, l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) offre, sur concours, des allocations permettant de compléter une partie de leurs études de maîtrise, de doctorat ou un stage professionnel dans une tierce institution. Il faut consulter les directions régionales de l’AUF auxquelles est rattachée votre institution d’origine pour connaître les dates de tombée des appels à candidatures. On peut aussi ouvrir un compte sur le site de l’AUF et compléter les formulaires des concours qui nous intéressent sur cette page.

Sur le site du CODESRIA, on peut trouver d’intéressants appels destinés à des doctorants, postdoctorants, jeunes chercheurs ou chercheurs confirmés dans le domaine des études africaines.  Les offres, cependant, requièrent le plus souvent une excellente maîtrise de l’anglais.

Pour étudier en Grande-Bretagne, il faut généralement passer un examen de langue permettant de confirmer le bon niveau d’anglais.  Plusieurs universités offriraient des bourses (parfois symboliques, vu le coût de la vie) pour les étudiants africains. L’université d’Essex, par exemple, tient un répertoire des opportunités en fonction des pays d’origine (pour l’Afrique : Égypte, Maroc, Ghana, Kenya, Nigeria, Libye).

En Belgique, l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur offre des bourses de master (master de spécialisation d’un an) et de stage de perfectionnement (entre 4 et 6 mois) au sein d’un établissement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. L’Université de Liège s’est également dotée d’une structure visant à encourager les relations de coopération au développement avec les pays dits « en développement », le Pacodel.

Le Ministère de l’Éducation et Enseignement supérieur du Québec accorde une exemption des droits de scolarité supplémentaires aux étudiants universitaires issus de différents pays avec lequel il a signé une entente. Cela signifie que, malgré leur statut d’étudiants étrangers, ils devront débourser les mêmes frais d’inscription que les étudiants québécois.

Il existe également un programme de bourses d’excellence pour les élèves et étudiants internationaux qui permet d’obtenir un soutien financier pendant les études (jusqu’à concurrence de 3 ans pour les études doctorales), une exemption des droits de scolarité supplémentaires (lorsque le pays de nationalité de l’étudiant ne figure pas dans la liste tout juste mentionnée) ainsi qu’une couverture médicale de la Régie d’Assurance Maladie du Québec.

L’Université Laval (dans la ville de Québec) offre des bourses de leadership et développement durable pour soutenir les étudiantes et étudiants qui ont réalisé des projets exceptionnels dans les domaine artistique, entrepreneurial, environnemental, scientifique, social/humanitaire ou sportif. Les étudiants doivent avoir déjà déposé une demande d’admission dans un programme de baccalauréat, de maîtrise ou de doctorat pour être considérés pour cette bourse.

Enfin, je vous invite à visiter mon blogue régulièrement : dans la section « agenda » (en bas à gauche de toutes les pages), vous trouverez un calendrier d’activités (colloques, conférences, écoles d’été, etc.) et d’appels à propositions, mais également les dates d’échéance pour déposer vos candidatures pour divers financements (postdoctorat, résidence d’écriture, bourse dans un domaine précis, etc.)

N’hésitez pas à me contacter pour enrichir ce répertoire.

no 9/ « faire que le possible marche en avant du réel»

     – Kasereka Kavwahirehi, Y en a marre ! Philosophie et espoir social en Afrique (Karthala, 2018)

Ces mois de mai et juin 2019, j’ai été amenée à voyager à Kigali au Rwanda et à Kinshasa en République Démocratique du Congo. J’y ai passé plus d’un mois pour y honorer différents engagements académiques et explorer les possibilités de collaborer avec différentes universités. 

J’ai répondu à Kigali à l’invitation à participer à un comité d’experts sur l’Histoire générale de l’Afrique où nous étions une douzaine de chercheur.e.s africain.e.s et internationaux invités à réfléchir aux prérequis à l’élaboration d’un glossaire décolonial à usage pédagogique. À l’occasion, nous avons chacun été amené à présenter un cours texte contributoire à la réflexion.  J’ai pour ma part présenté un résumé de l’article que je venais de publier dans le dernier numéro de la revue Présence africaine (2018/1, 197), « Ujuzii! Décoloniser les humanités », dirigé par Martial Ze Belinga. Il s’agit du texte « Philosophie africaine et décolonisation des humanités : une exigence radicale » dont on peut trouver ici la version pré-publication : ABADIE_Décoloniser les humanités

À Kinshasa, j’ai d’abord donné une séance d’enseignement à l’Université Catholique du Congo dans le cadre d’un cours élaboré en collaboration avec le département des sciences religieuses de l’Université de Montréal : j’y ai dispensé un cours d’introduction sur la pensée d’Achille Mbembe et la critique postcoloniale en abordant 1) les caractéristiques de la critique postcoloniale ; 2) le diagnostic critique du discours occidental et des impensés de la race ; 3) la proposition prospective de l’afropolitanisme. Le texte de ma présentation : PRÉS cours sur Mbembe.

À l’invitation du Père Emmanuel Bueya des Facultés de Philosophie de l’Université Loyola du Congo, je suis aussi intervenue aux côtés du professeur Ngoma Binda sur le thème « La philosophie africaine : pourquoi faire? » au Centre culturel Boboto. J’y ai fait une intervention qui, en suivant l’axe de la décolonisation épistémique, explorait les effets concrets de la colonialité sur les discours philosophiques et scientifiques ayant pour objet l’Afrique et l’africanité, mais également les pratiques du pouvoir en postcolonie ou les prémisses théoriques de l’économie du développement.  CONF_Philosophie africaine contemporaine notre temps.

Enfin, mon séjour s’est conclu par une participation au Colloque international sur l’héritage décolonial de la théologie de Jean-Marc Ela, organisé par Denise Couture et Ignace Ndongala de l’Université de Montréal. J’ai choisi d’y présenter l’héritage qu’a exercé la pensée d’Ela sur celle du philosophe congolais (par ailleurs professeur au département de français à l’Université d’Ottawa) Kasereka Kavwahirehi avec une allocution intitulée : « Kasereka Kavwahirehi : une herméneutique du monde d’en bas ».  J’y ai présenté son dernier ouvrage Y en a marre! Philosophie et espoir social en Afrique (Karthala, 2018) en suivant trois axes : 1) l’herméneutique du monde d’en-bas d’Ela et Kavwahirehi ; 2) une méthodologie inspirée de la théorie critique ; 3) les signes d’un monde qui vient.  CONF Colloque Jean Marc Ela_Kasereka Y’en a marre

Lors de mes interventions devant des étudiant.e.s, j’ai eu le coup de coeur pour la vivacité d’esprit des jeunes auditeurs et pour leur soif immense d’espérance. L’avenir du monde appartient aux jeunesses africaines…